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Comment (bien) se former au trading?

Comment (bien) se former au trading?

Se former au trading c’est comme se former à une discipline, une langue ou un métier. Si on souhaite se former il faut d’abord avoir des objectifs clairs, cohérents et en phase avec la réalité. Le trading est une activité très souvent évoquée mais au fond méconnue ou très mal comprise. Il s’agit d’une activité à part entière qui consiste à prendre des positions sur des actifs, quels qu’ils soient, pourvu qu’ils fassent l’objet d’une cotation, idéalement en continu avec l’objectif naturellement d’obtenir une performance régulière tout en limitant au plus risque et volatilité du capital.

 

Il est important de faire tomber d’emblée un poncif: il n’y a pas de secret et les traders régulièrement performants ne gagnent pas parce qu’ils jouiraient d’une forme de prescience « en devinant » ce que tel ou tel actif va faire dans un jour, un mois ou un an, mais parce que justement ils ont complètement intégré le fait qu’il ne savent pas ce qui va se passer et gèrent leur risque et leur taille de position en conséquence.

 



En revanche, ils ont développé une stratégie qu’ils ont rigoureusement backtesté (le backtesting consiste à étudier la performance corrigée du risque qu’une stratégie de trading aurait produite sur une période passée donnée si elle avait été appliquée avec constance) qui leur confère un avantage statistique au bout d’un nombre significatif d’opérations tout en ayant aucune idée de l’issue de telle ou telle opération individuelle à l’instar d’un casino qui gagne année après année sans jamais connaître l’issue d’un jeu ou d’une partie spécifique prise isolément (voir loi de probabilité).

 

C’est la raison pour laquelle, un casino invitera par exemple, avec des arguments souvent très convaincants, les compteurs de cartes au blackjack lui « volant cet avantage statistique » à aller exercer leur talent en dehors de leur établissement, et ce idéalement pour l’éternité.

Remarquons ici qu’il n’y a pas ce problème sur les marchés. Si le casino gagne régulièrement (comme les loteries nationales qui interdisent les tripots pour la même raison), c’est que son modèle économique dépend d’une variable aléatoire (le gain associé à chaque mise) dont l’espérance est positive (le casino gagne régulièrement) tandis que la contrepartie dans ce jeu à somme nulle est tributaire d’une variable aléatoire (le gain associé à chaque mise), affublée d’une espérance naturellement négative (les joueurs perdent régulièrement).

 

Notons à ce titre que plusieurs grands traders sont d’anciens compteurs de cartes. Et il y a de nombreuses analogies entre les stratégies gagnantes au poker et en trading.

 

Revenons au trading et évoquons rapidement les différents actifs qui sont traités dans ce cadre. Citons en vrac, les produits cash (ou spot en anglais) comme les actions qui sont traités le plus souvent sur des marchés réglementés, la présence d’une chambre de compensation assurant le bon dénouement de l’opération entre un acheteur et un vendeur. Par exemple, le marché des crypto-monnaies n’est pas réglementé au même titre que le forex (marché des devises) qui est un marché de gré à gré où l’on passe par un « dealer » pour assurer l’exécution d’une transaction (c’est pourquoi il n’y a pas de frais d’exécution en tant que tel pour acheter une paire de devises, le dit dealer se rémunérant sur l’écart de prix entre le meilleur acheteur et le meilleur vendeur pour faire simple). On peut aussi évoquer le marché des contrats à terme (« futures » en anglais) qui comme leur nom l’indique sont des marchés de produits dérivés qui permettent d’acheter ou de vendre à une date future, un actif donné ou sous-jacent (tel qu’une matière première, pétrole, coton, soja ou un actif financier- une obligation ou un taux d’intérêt par exemple) à un prix déterminé à l’avance pour une quantité donnée.

 

Ces marchés permettent de se couvrir contre des mouvements adverses de prix (au bénéfice par exemple d’un industriel producteur ou consommateur de l’actif sous-jacent) ou de spéculer en prenant par exemple des positions directionnelles sur un actif donné. Citons également les options (pensez au stock-options) qui sont des produits dérivés conditionnels donnant le droit (et non l’obligation, apanage des contrats à terme), moyennant le paiement d’une prime, d’acheter à une date future donnée, un sous-jacent donné (de nouveau) à un prix donné. Après ce bref et rapide préambule sur les différents actifs que l’on peut traiter sur les marchés, il est essentiel de comprendre que loin des fantasmes et clichés contrefaits au sujet du trading, il s’agit d’une activité à part entière qui doit être traitée comme telle par ceux qui souhaitent l’aborder sérieusement. Qui plus est, il s’agit d’un univers à somme nulle ultra-compétitif où près de 95% de perdants (institutionnels comme particuliers) vont nourrir 5% de gagnants quel que soit l’actif, le marché ou la stratégie utilisée si stratégie il y a. La plupart des formations de trading qui prolifèrent sur internet vendent « une stratégie de trading » en promettant des gains souvent élevés acquis naturellement en très peu de temps et encore plus naturellement sans aucun effort à des néophytes, qui tombent, malgré eux, de très haut quand ils sont confrontés à une réalité beaucoup plus amère que celle avancée par ces (trop) nombreux vendeurs de fumée. 70% à 80% des « traders » particuliers voient leur capital disparaître en moins de 6 mois…

 

Il convient ici de faire la distinction entre une stratégie de trading et un système complet de trading.


Une stratégie de trading est un peu comme une idée de création d’entreprise. Vous pouvez avoir une idée géniale mais jamais la mettre en œuvre ou n’être pas en mesure de le faire.

 

Globalement, une stratégie de trading intègre un horizon de temps (scalping, day-trading, swing trading, position trading) et une « philosophie » sous-jacente d’une part à la prise de position (ie l’entrée) et à la sortie des mêmes positions. 


Sans rentrer dans le détail du nombre incalculable de stratégies qui peuvent être mises en place, tentons d’illustrer la chose. On peut par exemple avoir une approche technique qui vise à interpréter des séquences de prix (analyse graphique ou technique) qui se reproduisent avec une fréquence suffisamment fiable pour conférer un avantage statistique à celui où celle qui l’utilise.

 

On peut acheter les cassures de zones de congestion (ie breakouts), on peut acheter quand 2 moyennes mobiles se croisent (typiquement quand une moyenne mobile courte passe au-dessus d’une moyenne mobile longue).

 

On peut aussi coupler l’approche technique qui exploite donc des indicateurs non dérivés (prix et volumes) et les indicateurs dérivés des prix ou des volumes (RSI, stochastiques, bandes de bollinger, etc) avec une approche fondamentale (analyse de la valeur d’une entreprise). 


Pour ce qui concerne la sortie d’une position, on peut sortir sur force (quand les prix vont dans le sens souhaité) ou sur faiblesse (quand le prix va contre le sens souhaité).

 

De nombreuses stratégies de trading présentant un avantage statistique sont disponibles gratuitement sur internet et pourtant la plupart des traders ne sont pas en mesure de les appliquer avec la discipline et la constance nécessaires pour générer des profits récurrents. 


Pourquoi? Parce qu’elle n’a pas été éprouvée, backtestée et intégrée de telle manière qu’on puisse l’appliquer avec constance notamment quand les conditions de marché ne manqueront pas de la mettre à mal aussi robuste soit-elle (la robustesse en trading est la capacité d’une stratégie à passer l’épreuve du temps et ce à travers toutes les conditions de marché possibles). En effet, quelle que soit la stratégie de trading utilisée, elle pourra connaître des périodes moins favorables et générer un drawdown (écart entre le plus haut et le plus bas du capital) plus ou moins important pendant une période donnée.

 

C’est la raison pour laquelle il est essentiel de se former par soi-même en lisant autant de livres sérieux écrits par des traders performants qu’il est possible ou/et de suivre sur les réseaux sociaux (tweeter est l’un des meilleurs pour cela) des traders partageant des informations extrêmement qualitatives (et je n’évoque ici aucunement les comptes qui partagent des signaux de trading ou des titres à acheter ou à vendre) et de s’orienter vers de vrais professionnels qui commenceront par vous parler d’écosystème des marchés, des biais cognitifs et comportementaux auxquels nous sommes soumis sur les marchés, de la nécessité de raisonner en termes de probabilité, de comprendre la notion d’espérance de gain (dont les composantes sont le hit-ratio, proportion de trades perdants vs trades gagnants, le risk-reward ratio, ratio du gain moyen sur la perte moyenne moyenne et enfin la taille de position), de gestion des risques, de l’importance de la définition d’une stratégie d’entrée et de sortie rigoureuse, du principe fondamental de composition des intérêts, de l’asymétrie entre la progression arithmétique des pertes et de la progression géométrique nécessaire des gains pour les recouper, etc.

 

Idéalement ces formateurs chevronnés n’évoqueront telle ou telle stratégie (et pas uniquement la leur), que dans le but louable d’illustrer les principes communs à tous les systèmes de trading gagnants et non pas pour vous vendre un produit clé en main… qui n’existe pas. 


Un système complet de trading intégre bien évidemment la stratégie de trading proprement dite mais relève d’une approche globale qui va intégrer TOUTES les composantes citées plus haut qui impactent la dite stratégie.


Autrement dit 2 traders qui prendraient exactement les mêmes signaux de trading pourraient voir leurs performances corrigées du risque sur une période donnée rigoureusement opposées juste parce que les paramètres de gestion des risques ou de taille de position (par exemple) ne sont pas identiques.

 

C’est la raison pour laquelle une formation de trading qui s’attacherait uniquement à décrire une stratégie prétendument gagnante sans l’intégrer dans un système de trading complet, n’a absolument aucun intérêt.


Pire: elle pourrait donner l’illusion de la facilité en oubliant l’essentiel et ce faisant accélèrerait potentiellement la chute de l’apprenant sur les marchés.


Enfin et pour finir, pour devenir un chirurgien, il faut une dizaine années d’études et certainement encore quelques années d’expérience pour être reconnu comme un expert.


Si vous voulez devenir un professionnel du basket ou un pianiste talentueux, les exigences seront, peu ou prou, les mêmes. Je ne vois pas comment il pourrait en être autrement pour le trading. Donc quand bien même vous trouveriez un trader mentor ou un trader/formateur expérimenté qui ne surfe pas sur votre crédulité en vous vendant des formations juste parce qu’il est justement incapable de gagner régulièrement sur les marchés, tout le travail commencera après la formation.

 

Ce n’est pas en 10 heures, 20 heures ou même 100 heures de théorie et/ou de pratique que l’on devient un champion.


Et c’est bien de cela qu’il s’agit. En revanche, une bonne formation peut permettre d’accélérer l’apprentissage si l’apprenant est vraiment dans la disposition d’apprendre et de faire le travail nécessaire pour arriver à devenir un trader régulièrement performant.


Elle peut permettre de prendre tout de suite les bons réflexes (typiquement et par exemple couper ses pertes et laisser courir ses gains et non l’inverse) et de bénéficier de l’expérience d’un trader qui aura essuyé les plâtres avant vous et sera en mesure de vous faire bénéficier d’un retour d’expérience particulièrement précieux.

 

En résumé, pour (BIEN) se former au trading, il faut:

 

-fuir les « formations » qui promettent de vous livrer le secret d’une stratégie unique qui est par essence non reproductible (voir le mirage du copy trading),

 

-se rapprocher de traders qui proposent un système complet de trading évoquant tous les points communs aux stratégies gagnantes et qui mettent l’accent sur la nécessité de comprendre l’eco-système des marchés, l’importance de la psychologie individuelle et collective, de la nécessité de mettre en place une gestion des risques draconienne et de raisonner en termes de probabilité (pour ne citer que les principaux points),

 

-comprendre que c’est en développant la bonne attitude qu’on devient un bon ou un très bon trader, et non en se focalisant sur la technique qui, somme toute, est la partie la moins difficile à intégrer,

 

-avoir la bonne disposition d’esprit et comprendre qu’une formation ne vous rendra pas riche du jour au lendemain et que le travail commence APRÈS la formation: une bonne formation l’est du fait du formateur(trice) mais aussi (surtout?) celui de l’apprenant(e),


-comprendre que le trading est un univers ultra- compétitif qui ne fait pas bon ménage avec l’amateurisme.


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